Tweet 03/10/2011 Black-out

Une seule minute peut dans certain cas permettre une foultitude de situations inattendues.
C’est ce qui arriva ce soir-là.
Un cours de body combat, comme nous les aimons tant, commença. Il était comme à son habitude accompagné d’une liesse transcendantale, d’une sorte d’osmose divine qui nous unifiait devant notre bien aimé gourou au crane déplumé.
Phil était présent et avait posé son sac de nems contre le mur à côté de celui de Rolph.
Les routines s’enchainèrent sans la moindre anicroche.
Cette perfection inhabituelle, à vraie dire, m’ennuyait.
Rien à raconter… Tout le monde se comportait d’une façon que je qualifierais de conventionnellement terne.

Heureusement, il y eut cette minute bénite où une coupure de courant nous plongea brutalement dans l’obscurité la plus totale.
Après un bref silence, Dominique ne voulant sous aucun prétexte arrêter son cours se mit à chanter pour remplacer la musique défaillante :
« Allez on continue ! Marylououououou !
Chantal murmura :
« Mes boules Quiès où sont mes boules Quiès. Puis, après quelques secondes, elle eut un soupir de soulagement. Ouf ! Je les ai trouvées. »
Olga cria :
« Crotte de nez ! »
Phil murmura :
« Il est temps pour un petit casse-croûte ! »
J’entendis Catherine exultée de joie :
« Enfin un peu d’intimité ! »
Un grand bruit sembla provenir du plafond.
Devant moi, Venu se mit à crier :
« Aie ! Qui me pique le dos ? »
Dans un coin de la salle une voix que je ne reconnus pas tout de suite chantait :
« Mon bébé chéri… »
J’entendis au ras du sol des tas de petits bruits bizarres.
Puis il y eut un cri de douleur et, et…
La lumière fut !

Je vis d’abord Catherine, perchée sur l’estrade, légèrement penchée en avant. Elle nous tirait la langue, les deux mains formées en oreilles de lapin s’agitaient au-dessus de sa tête.
Surprise par le retour de la lumière; Rouge de honte elle s’enfuit pour se cacher sous sa serviette.
Phil et Rolph assis dos au mur, les jambes étalées devant eux éructaient de dégout. Leurs mines verdâtres ne laissaient rien de bon à présager. Dans la main de Phil on pouvait apercevoir un sandwich du café Vaudois tandis que dans celle de Rolph trônait un nem dégoulinant de graisse.
Un petit chien se tenait aux pieds d’Olga :
« Ah, fidèle camarade Krotdené, tu es venu me sauver ! »
Un petit aparté pour vous préciser que le joli nom Russe, Krotdené, peut se traduire en Français par « Met délicieux au goût divin… »
Un petit homme rondouillard qui avait eu la mauvaise idée de prendre la place de la petite blonde qui se tenait d’habitude devant Venu, se frottait le postérieur en grommelant :
« J’me demande bien qu’elle est l’abruti qui m'a pincé les fesses ! »
Venu torse nu exposait son dos à Dominique en demandant :
« Ca me pique, regarde si je n’ai pas une allergie ? »
A la suite d’une galipette certainement mal contrôlé, César se retrouvait la tête en bas, les pieds plantés dans le faux plafond.
Je l’entendis supplier Meriem :
« Help, please aide moi ! »
Meriem dont la Burka laissait filtrer peu de lumière ne s’était même pas aperçu de la panne de courant et continuait sa routine en criant :
« Z’y va trop d’la bale ! »
Aurélie, entrainement de future maman oblige, tenait par la jambe gauche un bébé en cellulose et tout en le secouant de haut en bas elle entonnait :
« Fait dodo Colas mon p’tit frère… »
Gaby, assise en tailleur un crâne posé devant elle, tenait dans sa main gauche une poupée de chiffon qu’elle piquait violemment sur le dos avec une aiguille en murmurant :
« Ça t’apprendra à harceler toutes les filles que tu rencontres ! »
Puis voyant Chantal, elle s’arrêta net.
Ses yeux eurent une lueur d’envie et sa bouche ouverte laissa échapper un filet de salive.
Je ne compris pas tout de suite sa réaction jusqu’à ce que notre féministe se tourne vers moi.
Deux Tampax usagés étaient plantés dans les oreilles.
Dominique rangea la photo de sa grosse Italienne dans sa poche intérieure, là où se trouvait son cœur, puis après un long soupir passionné il ordonna :
« Allez les enfants il est temps de reprendre le cours ! »


 


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