Tweet 04/07/2011 Vade retro satanas


en AUDIO

Comme souvent le mercredi matin, j’attendais devant le confessionnal.

Le curé qui me connaissait bien me dit :
« Alors Pierre, vous avez encore raccompagné Chantal hier soir ! »
- Oui ! Répondis-je d’une voix fluette et honteuse.
- Et elle a encore dit des gros mots.
-Oui des tas et puis…
-Quoi mon fils ?
-J’ai failli écraser un chat, alors là, elle m’a copieusement insulté d’invectives dont je ne connais même pas la signification. Mon ingénuité en a pris un sacré coup.
-Très bien mon fils !
Le curé se frotta les mains et les yeux remplis de malice, il m’invita à entrer dans l’isoloir.
La séance dura une bonne heure où je m’efforçai à répéter chaque insulte qu’elle m’avait lancée. L’ecclésiastique, tout en s’appliquant à noter sur son calepin tout le fil de l’’histoire, déclamait à tout bout de champs des vocalises offusquées.
Le cœur plus léger je quittai le lieu de confession remerciant le prêtre pour son absolution.
Il me répéta :
« A bientôt mon fils, à bientôt… »

Plus tard dans la journée, me promenant à Divonne, je rencontrais Venu, l’air déconfit, qui allait à un rendez-vous avec son Psy.
« Alors Venu, toi aussi ! Lui dis-je dans une complète lucidité.
-Oui, j’ai rencontré Chantal à la Fnac de Balexer, et avec son langage fleuri, mes oreilles ont tout de suite sifflées, puis… Elle s’est énervée sur un vendeur qui paraît-il la regardait de travers. Et, ce fut la panique, les mères de famille s’enfuir tenant dans leurs bras leurs rejetons en leur bouchant les oreilles et une vieille dame, derrière moi s’est même évanouie.
Puis, Venu me quitta grelotant d’angoisse en pleurant.

On était mardi après-midi quand je reçu un sms de notre chère Chantal.
« B… à queue de pompe à M… je peux pas venir ce soir »

On était tous là ce soir au cours de body combat. Chacun avait l’air heureux et détendu.
« Z’y va, j’vais pas jeûner cette semaine, quand il y’a la Chantal, pour moi, c’est toujours ramadan ! » Nous dit Meriem vraisemblablement soulagée.
Aurélie nous dit qu’elle lui avait provoqué deux fausses couches.
Catherine n’avait pas ses rougeurs de honte habituelles.
Venu osait aborder quelques donzelles aux formes avantageuses sans la peur d’être importuné par l’apparition de notre féministe.
Olga nous dit que son cousin avait également un chat qui s’appelait du joli nom Russe de Boredèleakeu qui veut dire « Endroit charmant où l’on peut se retrouver »
Rolph pour fêter l’absence nous avait amené des bonbons à l’ail.
César virevoltait tel un oiseau et Gaby paisiblement gravait de son cran d’arrêt une jolie tête de mort sur le crâne de Dominique.

Et la question que tout le monde se posait me fut proposée :
« Pierre, toi qui a toujours de bonnes idées, qu’est-ce que l’on pourrait faire pour que Chantal soit plus… Hummm… abordable, présentable, enfin moins vulgaire !

Ma première réaction fut d’aller voir Phil qui passait par là.

« Mais non, ce n’est rien, me répondit-il, en vérité elle s’exprime dans un dialecte Chinois de la région du fleuve jaune ! »

Je laissais notre pauvre ami à sa naïveté amoureuse.

C’est deux jours plus tard qu’une idée de génie éclaira mon esprit embrumé.

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Ce mardi soir, j’étais arrivé à mon cours de body combat accompagné d’un homme que je présentais comme un ami au nom de Gaston.
C’était un petit homme à la carrure jovial et au teint rougeau. Il était habillé d’un de mes short bleu foncé, utilisait mon t-shirt Ibiza et ses chaussettes dépareillées trempaient dans des baskets hors du temps.
Pour vous dire la vérité, il n’était pas mon ami mais l’exorciste officiel du Vatican. Il avait caché un crucifix dans les revers de son slip et attendait avec impatience la venue de notre Chantal pour mettre en œuvre ses pouvoirs.

Elle arriva et, immédiatement, il se mit à trembler. Une épaisse sueur recouvrit son front et sa main droite s’apprêta à empoigner son arme de guerre quand je me mis à lui donner quelques coups de coudes en lui disant à voix basse :
« Mais, Monseigneur, c’n’est pas Chantal, c’est Aurélie !

-Hummm, me répondit-il, tout le monde peut se tromper… »

-Aille gade fly let allé in the salle ! Nous dit Dominique notre bien aimé gourou dans son anglais si particulier, puis il se mit à beugler sa chanson favorite qui nous fit mal aux oreilles.

Chantal légèrement en retard arriva en courant :
-M… ça fait C… cette P… de circulation ! » Dit-elle dans son langage si particulier.

Monseigneur me regarda en articulant en silence « ça doit-être elle. »

Il se plaça derrière elle et le cours commença.

La routine d’échauffement se passa plutôt bien, Monseigneur suivant tant bien que mal les mouvements qui lui étaient inconnus. Il en profita pour surveiller notre féministe d’un œil attentif.

Puis, soudain, il sortit son crucifix et le porta au-dessus de sa tête en criant :
-Vade retro Satanas !

Chantal continua ses exercices sans sourciller, par contre ce fut Aurélie qui réagit violemment, ses cheveux se dressèrent sur la tête, ses yeux sortirent presque de leurs orbites et elle se roula à terre en criant :
- J’aime pas les enfants, ils puent, ils chialent toutes les nuits, ils caquent partout !

N’ayant visiblement pas atteint son but le curé essaya de nouveau !

A cet instant précis, Venu, arrêtant ses évolutions, le regard lubrique, se retourna en direction de César en disant :
- Mon p’tit choux moi aussi, je veux bien faire des galipettes avec toi !

Puis ce fut au tour de Catherine qui se précipita sur l’estrade et commença un strip-tease très engageant.

Meriem enleva le voile de sa burka, vola la bouteille de vinasse qu’avait apporté Rolph et le gosier en l’air, lapa le nectar démoniaque avec délectation :
- Z’y va c’est trop d’la balle ce narpi !

Olga se mit à fredonner cette fameuse chanson qu’elle avait intelligemment détournée :

-Des gros sous, des gros sous, toujours des gros sous, des sous première classe, des sous d’seconde classe !

Phil qui nous regardait faire le nez collé sur la vitre de séparation, nous montra d’un air déconcerté, son bol de riz qui venait brusquement de se transformer en une grande assiette de spaghettis à la carbonara.

Une auréole se forma au-dessus de la tête de Gaby et tous ses tatouages de têtes de mort se changèrent en de magnifiques représentations divines.

Puis ce fut la débâcle dans la salle, des têtes pivotèrent sur leurs troncs, des donzelles se vautrèrent sur le plancher en bavant…

Seule notre admirable Chantal continua ses enchainements sans coup férir.

Le cours fut arrêté net par notre gourou et grand entraîneur Dominique.

-M… vous faites C… avec vos C… ! Hurla Chantal !

Scrutant notre maître incontesté avec la plus grande attention je me demandai comment cet être d’exception avait réussi à échapper à l’exorcisme?

Puis, Rolph qui tenait encore debout, lui apporta un petit plat de chez Lenotre avec une bouteille de Don Pérignon qui étaient sortis comme par magie de sa besace.

Pour le remercier Dominique se mit à lui chanter d’une voix douce, mélodieuse et enchanteresse l’une des chansons phare de Chantal Goya :
-Ce matin un lapin a tué un chasseur…
Puis, il nous dit dans un anglais aux intonations très « British »
-Time to go home my fellow Body fighters, have a peaceful night, God bless you and so do I !

A cet instant que je compris que je venais d’être témoin d’un désenvoutement vraiment exceptionnel…

 


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