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 09/08/2013

Le bijou


En cette fin d'année scolaire, notre petite dernière, Dorothée, avait eu des résultats tout à fait convainquant. J'avais donc suggéré à mon épouse qu'un petit présent de notre part serait de bonne augure pour couronner son année d'abnégation et de sérieux.
"Tou è fou, me hurla ma douce épouse Polonaise, tou croa con è rockfeller!"
Je fis une moue d'irritation et dodelinai de la tête en signe de désapprobation en me disant 
que connaissant le côté pingre de ma compagne, j'aurai dû éviter ce type de sujet qui, pour elle, était d'une extrême sensibilité.
Remarquant ma divergence, elle se reprit et, à ma plus grande surprise, m'affirma qu'en fait, j'avais tout à fait raison et qu'elle s'occuperait elle-même de cet achat.

Quelques jours plus tard elle se retrouvait dans cette petite bijouterie en liquidation qui semblait proposer des affaires très intéressantes.
Elle se rua vers la vendeuse en demandant :
-jé veu joli cado pour fille trè inteligent!
Tout en interrogeant sur l'âge de la récipiendaire la préposée sortit un florilège de parures dont la valeur  oscillait entre une bonne centaine et un bon millier d'euros.
-tou è fol, gronda ma mie, zé soui pas Crézousse!
Alors il lui fut proposé un assortiment moins reluisant mais dont le prix se réduisait à deux chiffres.
Furieuse, mon épouse, la remercia d'une bourrade et lui expliqua qu'elle allait fouiller elle-même avant de se décider.
Moins d'une heure plus tard elle appela la boutiquière et pointa du doigt une boucle d'oreille. Plutôt jolie, je dois l'affirmer, certainement en or avec de magnifiques pierres décoratives le tout dans une stylistique très féminine.
-Jé vo celoui là, cinq Euros!
-Malheureusement madame nous n'avons pas la paire.
Par un grognement elle lui fit comprendre que sa demande était un ordre.
L'objet unique fut donc vite emballé dans son écrin et mon épouse rentra au bercail divinement satisfaite.

C'est quelques jours plus tard, au cours d'une soirée familiale que ce que l'on croyait être un magnifique présent fut offert.
 Ma douce aimée précisa qu'il était de notre part commune.
La surprise était empaqueté dans un charmant papier vert émeraude et ma fille ébahie en eut les larmes aux yeux :
-Merci maman, papa, vous êtes les meilleurs parents au monde! Dit-elle en nous embrassant avant même d'avoir ouvert le cadeau.
Sa sœur jalouse marmonna son mécontentement et ses frères se penchèrent pour apercevoir la gratification.
 
Après avoir combattu l'emballage, Dorothée en sorti le joli petit coffret qu'elle entrouvrit pour apercevoir le bijou. Puis la mine interrogative elle le secoua, fouilla le carton de son doigt pour finalement le renverser sur la table et dévoiler l'unique objet :
-Mais il en manque une! Affirma t-elle avec raison.
-Tou è jamè contente bougonna ma femme.
Ses frères et sœur éclatèrent de rire, elle versa quelques larmes et je ressenti la honte de ma vie...

Deux semaines plus tard, C'est un peu par hasard que j'aperçu ma fille sortir de "Chez Alphonse trocavente," en me voyant, elle rougit et les deux pièces qui naviguaient dans sa main me firent comprendre la raison de sa présence en cet imprévisible lieu :
-J'ai laissé la boucle d'oreille que maman m'avait offert, je n'avais pas de monnaie pour m'acheter un coca, alors! Puis, elle compléta, le monsieur m'a dit que le boite était jolie.

C'était le jour anniversaire de Dorothée.
Il fallait que je rattrape l'impair du dernier désastre, j'avais pour cela interdit à mon épouse de s'occuper des présents et, de ceci, j'en suis particulièrement enchanté.
Cette fois ci, elle fut gâtée.
Une tablette PC dernier cri de ma part et ses frères et sœur avaient cassé leurs tirelires pour compléter son plaisir.
La fête battait son plein de félicités.
Seule ma femme gardait le visage renfrogné et semblait à l'évidence triste et dépitée.
Pourtant quand l'euphorie de béatitude fut passée elle ouvrit son visage et resplendissante de contentement elle nous dit :
-E bien jo po dire que tou a mère exceptionnelle.

Puis avec une dextérité singulière, elle plongea sa menotte profondément dans son sac pour en sortir une jolie petite boite qu'elle plaça avec une évidente distinction devant nous.

Le petit contenant était libellé "Chez Alphonse."